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lorsque la terre sombre en l’océan,
lorsque l’océan sombre en lui-même,
temps infini, au-delà de l’au-delà +
mots surgis de leur méconnaissance, embusqués.
mots venus de si loin,
de la pensée inconstituée voguant en l’azur +
mots incertains, balbutiements
pour, peut-être, qu’advienne la poésie
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Les ombres
Cette période où l’ombre portée s’invite dans l’œuvre plastique va apporter à cette dernière une dimension poétique liée à ce que l’ombre implique de silence, de précarité temporelle, d’éphémère, d’ambigu, d’immatériel et de rapports complexes à ce qui la projette. L’ombre est souvent là, à nos côtés ou étendue sur le paysage sans même être perçue en tant que ce qu’elle est, un peu mystérieuse. Brigaudiot va intégrer des ombres à ses œuvres, jusqu’à en faire le sujet du tableau ou de l’objet. On est alors dans la période des œuvres roses, sculptures roses ou des mariées, puis des objets et tableaux-reliefs. L’atelier de Nice est sur la colline de Canta Galet et reçoit de point fouet la lumière solaire; des lierres pendent ça et là et dans la chaleur, leurs ombres bougent à peine sur le mur teinté de rose, crépi à la chaux. Travail de notation rapide des contours, report sur le support choisi. Il y aura des ombres de feuillages et des ombres d’objets, telle une chaise, qui seront fixées ainsi puis peintes en rose, parti pris d’un kitsch déjà éprouvé avec les mariées / sculptures roses. Ce rose chair sera pendant quelques années le label Brigaudiot, couleur insupportable pour certains détenteurs d’un vrai bon goût! Outre les ombres de feuillages déclinées de différentes façons dont quelques séries au crayon de couleur reportées sur calque, donnant lieu à des tirages sur papier transparent, il y a les ombres inscrites dans les tableaux-reliefs, objets d’assemblage d’objets divers: crucifix, petits jouets et figurines comme des moutons, fleurs artificielles. Ombres encore sur une série dite des pianos, objets de la famille rose, faussement fonctionnels avec leurs tiroirs et couvercles mobiles. Ces pianos sont réalisés à proximité d’une maquette de décor pour La Tentation de Saint Antoine, mise en scène par Jean-Marie Villégier.
Ces ombres, dans une mise en perspective des productions de Brigaudiot, témoignent de la sous-jacence d’une dimension poétique plus ou moins perceptible selon les périodes.