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bruissements, rien ou presque
été l’insignifiant en l’indifférence
entre l’immense et ici, là
le sens échappe
disséminé en l’espace, au-delà des nues diaphanes
en gris ou traversées de bleus si pâles
si pâles +
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Le Château
Brigaudiot entra aux Beaux-Arts de Nancy (1960-1962) dans le but d’apprendre la sculpture, mais pour ce faire, il fallait passer par des années d’apprentissages divers, académiques, laborieux et peut-être stériles, ce qui ne lui convint nullement, pas davantage que l’esprit scolaire et fermé régnant alors. Aussi il tenta d’être artiste ; portraitiste, décorateur de vitrines, affichiste, expositions au sein de groupes artistiques locaux et plutôt improbables quant à leurs productions.
Dans l’œuvre de Brigaudiot, cette période du Château est sans doute la première période qui puisse être qualifiée comme telle, en raison de sa cohérence thématique autant que stylistique. Elle se déploie entre 1964 et 1965 et fait référence tant au lieu lui-même, un petit château fin dix-huitième siècle ou début dix-neuvième sis à la limite de Nancy, le château de Jericho. Y ont vécu une joyeuse période en tant qu’inséparables compères un poète américain, William Harold Brown et Jean-Pierre Brigaudiot. Le premier, en tant que militaire, était basé à Nancy, le second revenait de son service militaire ou faute de tenir un fusil, tant en dehors de la caserne qu’à l’intérieur, il fut peintre aux armées, portraitiste, artiste muraliste et organisateur d’expositions. Le château : soirées de type Fluxus, performances avant même que le terme ne fut en vogue, production d’objets plus ou moins dadaïstes ou surréalistes, lectures de Proust et de poètes contemporains américains ou vietnamiens, traduction de Nazim Hikmet. Les invités et convives écrivaient de la poésie, ce à quoi Brigaudiot et William Brown ajoutaient leur propre poésie et des œuvres plastiques éphémères et expérimentales. C’est dans ce cadre que Brigaudiot, déjà rêveur, peignit ces gouaches d’un esprit onirique figurant les reflets de miroirs rococos en enfilade, de lustres non moins rococos et une silhouette flottante de femme sans visage étant là comme une apparition. Reflets dans les reflets peuplés de bulles flottantes. L’aventure ne dura guère que deux ans mais elle fut intense et déterminante pour Brigaudiot quant à plonger en art, bien au-delà de ce que les Beaux-arts de Nancy lui avaient laissé entrevoir d’un art déjà-vu et hostile à ses aspects modernes et contemporains.