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reflets de l’indéfini, surface mouvante,
eaux lentes, si lentes qu’à peine se trouble l’image
images d’images, reflets sans réel,
toute forme se dissout et s’informe
temps du doute, mémoire égarée
irréalité flottante, sfumato
indécidables proches et lointains
sens troublé, tapis en la pénombre
l’esprit vogue, au-delà, porté, emporté, enchanté
en un rêve, comme une supplique adressée aux cieux
+ azur
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Airports
2000-2005
Dans la démarche de Brigaudiot, la période Airports apparaît au début des années 2000 et passe peu à peu de petits et moyens formats, peints sur carton ou sur bois contreplaqué brut, à des formats muraux, peints sur bois, dont les dimensions atteignent jusqu’à 5 mètres. Ces œuvres, déjà en cours d’émergence vont se développer massivement lors du séjour de longue durée de Brigaudiot à Séoul, professeur invité par l’université nationale de Séoul, Faculté des beaux arts.
Il s’agit d’une interrogation du sens et de la forme que peut avoir le paysage contemporain, celui qui cohabite avec le paysage traditionnel tel qu’il est présent dans ses différentes pratiques et représentations. Pour Brigaudiot, la réflexion et la recherche sur le paysage, avec les œuvres qui en découlent se sont développées peu à peu, par tâtonnements, dessins et photos depuis fort longtemps, puis s’est formalisées dans les années 80 et s’articule alors à la question de la discontinuité de la perception du paysage, laquelle découle grandement des modalités des déplacements contemporains. La période Airports procède d’une appréhension icarienne du paysage, celle qui nous est donnée par la télévision et la photo, mais surtout par les satellites, autant que par les déplacements humains par avion ou train. Tout cela met le paysage à distance du corps et des sens. Il en découle également une imagerie abstraite et numérique d’où la nature sensible qui fonde le paysage dans son rapport à l’homme, est quasiment éradiquée au profit d’une appréhension “flashée”, morcelée, sans réelle durée que celle de l’instant déjà aboli.
La période Airports s’est donc constituée lors des voyages de l’artiste, elle s’est focalisée sur les signalétiques peintes au sol, celles des routes, des rues ou des aéroports. Ce sont des figures géométriques simples et fonctionnelles, attachées à des codes, dont la lecture et la compréhension sont instantanées. L’ensemble de ces signalétiques constitue l’une des modalités d’existence très fonctionnelle du paysage contemporain, urbain, routier ou aéroportuaire.
Le principe d’exécution des œuvres repose sur une combinatoire ludique et permutationnelle: en principe chaque œuvre part d’un groupe initial de carrés sur lesquels sont peintes les figures géométriques simples: barres, bandes, croix, pointillés. Deux carrés ainsi peints sont disposés l’un sur l’autre, l’un en diagonale par rapport à l’autre; ce qui déborde du carré du dessous est découpé, ôté puis réaffecté aux alentours des deux carrés initiaux. Ainsi avec les Airports s’agit-il d’un art quelque peu ludique dont les formes varient à l’envi. L’œuvre est ainsi à jamais, in-finie. Ce principe, au-delà de sa dimension ludique, correspond à la perception qu’a le voyageur. Perception du sol, portion de paysage, un sol marqué de signalétiques, perception où la vitesse et les basculements de l’avion au décollage ou à l’atterrissage offrent une vision parcellaire. Perception discontinue, par bribes où la partie en sa multiplication vaut pour le tout.
Développements.
Les œuvres de cette période restent en attente d’un possible développement en des formats monumentaux. Leur réalisation pourrait se faire en intérieur et rester peintes sur bois contreplaqué, ou bien se faire en extérieur; en ce cas, l’idée serait une réalisation en céramique ou en tôle émaillée (CF panneaux routiers), afin de garantir une pérennité sans limites comme il est est de la céramique des mosquées et palais des terres d’Islam.
Pour les œuvres tridimensionnelles, sortes de maquettes d’architecture imaginaire et réalisées en carton, elles existent en tant qu’ œuvres autosuffisantes, telles qu’elles sont, tout en suggérant un possible devenir à l’échelle du paysage urbain, voire du jardin public. Il pourrait alors s’agir de constructions de béton brut dont les figures géométriques du dessus sont en céramique. Les dimensions peuvent s’imaginer allant des praticables d’aires de jeux jusqu’à celles d’immenses buildings que seuls les passagers des avions ou les dieux pourraient contempler.
Ces œuvres pour une partie non négligeable d’entre elles, ont été produites en Corée et maintes fois exposées, et ce jusqu’à présent, en galeries, foires d’art et musées. Les plus grands formats ont été réalisés sur bois contreplaqué, après le retour de Brigaudiot en France.